La musique pendant l'été 1939
Elle a toujours occupé une essentielle dans la vie des internés, mélomanes ou non. À tout moment, elle apparaît comme un des facteurs majeurs de leur vie et de leur survie. Elle accompagne les activités, rythme les moments marquants de la journée, rassemble, mobilise et entraine. Elle n’a rien de comparable avec ce que l’on observe habituellement dans la vie de quotidienne.
Une place omniprésente
Il ne s’agit pas de se mettre en avant, de s’afficher, de préparer un concert, de conquérir un public, de travailler à un enregistrement ou de ravir un auditoire. Rien de tout cela. Il s’agit seulement d’accompagner les activités de la journée, de souligner une occupation commune, d’égayer un moment, de se laisser aller au plaisir de fredonner une rengaine, de reprendre un refrain au compagnon qui chante, bref, d’exprimer la vie dans sa banalité. Bien sûr, il y a aussi des concerts, des soirées, des représentations avec chœurs et instruments musicaux, mais l’habituel n’est pas là.
Les instruments, en règle générale, des banjos, des guitares ou des mandolines, mais aussi, des trompettes, un saxophone et une clarinette, ont été jalousement conservés par leurs propriétaires tout au long de leur exode hors d’Espagne. La plupart de ces musiciens ont préféré se passer d’un manteau ou d’une couverture, d’un baluchon ou d’une valise, plutôt que de renoncer à leur instrument de musique. Ils ont dormi avec lui, l’ont protégé et caressé pendant des semaines, mais ne s’en sont jamais séparés.
La musique nous a beaucoup soutenus pendant notre séjour à Gurs. De l'extérieur, les gens qui circulaient sur la route nationale longeant le camp, pensaient que nous jouions pour notre plaisir, pour nous détendre. Ils ne comprenaient pas que la musique nous a aidés à surmonter les épreuves, nous a soutenus, nous a donné en partie ce que l'internement nous interdisait, l'espoir en quelque chose de beau."
Témoignage de Julian Castejon
Les chœurs
Il en a existé environ une dizaine.
Le plus réputé était le chœur basque, dirigé par Regino Zorozabal, ancien directeur de l’Orphéon municipal de Madrid. Plusieurs chœurs espagnols existaient aussi : celui des "aviateurs", celui des Catalans, celui des Aragonais, etc... Chaque groupe national des volontaires interbrigadistes possédait sa propre formation : les Allemands, les Polonais, les Italiens, les Tchèques, les Hongrois, les Roumains, etc... Le répertoire est varié, plutôt populaire et traditionnel chez les Espagnols, plutôt politique et martial chez les "internationaux".
Les répétitions et les concerts, en fin de journée, sont très courus par tous les internés, mélomanes comme néophytes.
La notoriété de ces chœurs se répand rapidement dans toute la région, au point que certaines municipalités ou associations souhaitent les inviter pour animer leurs fêtes annuelles.
"La Chorale oloronaise", par exemple, tente d'obtenir le concours du chœur basque à l’occasion des cérémonies du 14 juillet. Le préfet refuse d’accorder la permission de sortie, arguant du "précédent qui serait créé, dont certains groupements politiques ne manqueraient pas de tirer parti."
Les orchestres
Trois orchestres étaient particulièrement réputés.
L’orchestre basque de Regino Zorozabal, regroupe une douzaine de membres. Chaque exécutant joue de son propre instrument. Il se produit, en règle générale, en même temps que le chœur.
L’orchestre international, sous la direction d’Ebrhard Schmidt, du Philharmonique de Berlin, rassemble une quinzaine d'instrumentistes : violonistes, guitaristes, accordéonistes, clarinettistes, flûtistes, etc... Il bénéficie de la présence de plusieurs chanteurs d'opéra, parmi lesquels le ténor Ennio Tofoni, du Théâtre de Rome, et le baryton Winterstein. C’est Toffoni qui chantera "La Marseillaise", lors des cérémonies du camp de Gurs célébrant le 150ème anniversaire de la Révolution française, le 14 juillet 1939.
Le volontaire italien Giovanni Battistuta raconte, au sujet du chœur "international", l’anecdote suivante : "j’ai entendu un soir, s’élevant d’un îlot voisin, le Chœur des Esclaves, du Nabucco de Verdi. Je me suis arrêté de marcher. Autour de moi, en quelques secondes, tout le monde s’est arrêté de parler. On a tendu l’oreille, immobiles. Au Harpo d’oro, tout le monde pleurait autour de moi."
L'orchestre de la compagnie de travail est assez mal connu. On sait cependant qu'après la déclaration de guerre, il absorbe progressivement la plupart des membres de l'orchestre basque et qu'il deviendra, à l'époque de la "drôle de guerre", l'unique groupe musical du camp.
Les soirées musicales
Peu d’informations à leur sujet, sinon qu’elles étaient données dans des conditions de confort et d’acoustique particulièrement mauvaises et qu’elles ont laissé un souvenir inoubliable aux participants.
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