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Une calamité : la boue. Témoignages

Tu as vu Le Vernet, mais Gurs est mille fois plus miteux. C'est un bourbier de 2 km² où pataugent 12000 hommes, femmes et aussi des enfants. C'est un spectacle pitoyable que ces milliers de femmes et d'enfants qui, derrière les barbelés, se traînent dans la boue, parfois jusqu'aux chevilles. Le cœur saigne devant ces enfants, victimes innocentes, que notre méchanceté entre semblables a jetés dans cette géhenne.


Lettre datée du 20 décembre 1940, interceptée par la censure à Perpignan, où résidait le destinataire, et reproduite dans la correspondance n° 1207/PG adressée le 23 décembre par le président du Contrôle postal au préfet des Basses-Pyrénées. (Arch. Dép. Pyr. Atl., 500/12).

 

Les scènes les plus pénibles et les plus comiques à la fois se produisaient jour et nuit, quand les gens s'enlisaient.

Siegbert Plastereck Rapport Plastereck, op. cit., p. 9

 

Le chemin vers "l'estrade", sans chemin d'ailleurs, était un véritable calvaire. Dès que l'on quittait la baraque, on s'enfonçait jusqu'aux chevilles dans un sol spongieux et, dans certains cas, plus profondément encore. Il m'est souvent arrivé d'aider un pauvre homme, en le tirant de ce cloaque, d'où il aurait été incapable de sortir seul. (…) Lorsqu'on pénétrait dans l'îlot, le combat commençait. Ce combat était d'autant plus inégal que nos chaussures de ville n'étaient pas de taille à lutter contre un sol aussi sauvage. La, boue pénétrait partout et laissait le pied complètement trempé.


Eugen Neter, "Erinnerungen…", op. cit., décembre 1961, p. 51.

 

Celles qui n'avaient pas de bottes à revers ne pouvaient se risquer dehors. Par de telles journées, les enfants et les vieilles femmes étaient cloîtrées dans les baraques à l'air empuanti, et dans une obscurité permanente, car il faisait trop froid pour laisser les lucarnes ouvertes. On ne vivait pas, on végétait.


Hanna Schramm, Vivre à Gurs, un camp de concentration français, 1940-1941, François Maspéro, Coll. Actes et mémoires du peuple, Paris, 1979, p. 9

 

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