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Problèmes immédiats et répartition des tâches (1939)
Les problèmes de tous genres surgissent immédiatement. Ils sont rapidement réglés.
Définir le cadres juridiques
L'encadrement et la garde du camp relèvent de l'autorité militaire, c'est-à-dire du Ministère de la Défense Nationale. C'est donc l'armée qui sera chargée d'administrer le camp, comme elle le fait dans les autres camps créés au nord des Pyrénées. Mais la construction du camp relève du préfet des Basses-Pyrénées, c'est-à-dire du Ministère de l'Intérieur. Celui-ci délègue immédiatement la charge aux services départementaux des Ponts et Chaussées. C'est l'ingénieur d'arrondissement Elysée Larribau qui est nommé pour mener le travail à son terme.
Du point de vue juridique, il faut régler les modalités de l'occupation du terrain.
Les terres qui forment l'assiette du camp sont constituées de biens communaux et de domaines familiaux. Le ministère de l'Intérieur les réquisitionne le 15 mars 1939, les fait expertiser et passe avec les propriétaires un bail de location reconductible tacitement. Le montant des loyers mensuels est fixé à 4,50F l'hectare.
Après la liquidation du camp, en 1946, les comptes des Ponts et chaussées font apparaître que 32 988,50F de loyers ont été versés en un peu plus de sept ans, c'est-à-dire un chiffre correspondant sensiblement aux clauses définies en 1939 - en tout cas, n'ayant plus aucun rapport avec les prix pratiqués en 1945.
Il faut noter que les difficultés juridiques ne sont pas venues des propriétaires en titre, mais de la petite commune d'Esquiule, située à neuf kilomètres à l'ouest d'Oloron. Se référant à un for accordé en juin 1524 par Henri d'Aibret, vicomte de Béarn, le maire d'Esquiule rappelle aux autorités administratives que sa commune "possède un droit de pacage imprescriptible sur les terres des villes et lieux de Sainte-Marie, Josbaig, Moumour, Féas, Ance, Aramits et Gurs" ; l'installation de clôtures sur la lande de Gurs constitue donc une violation de l'ancestrale coutume et empêche "le libre exercice du droit de pacage dont la communauté a pu jouir pendant des siècles".
Certes le maire, sentant bien que sa protestation risque de rester lettre morte, ne réclame pas le rétablissement du privilège multiséculaire et se contente de "souhaiter du moins toucher à juste titre une partie de l'indemnité allouée par l'Etat à la commune de Gurs, à titre de dédommagement". Il n'obtiendra pas la moindre indemnisation, mais l'affaire en dît long sur le comportement d'une large partie des populations environnantes à l'égard du camp.
Rassurer les riverains
Le préfet Surchamp s'efforce d'abord de rassurer la population. Il échange plusieurs courriers avec les maires de la vallée, dans lesquels il précise que son action se situe dans le cadre des instructions que le ministre de l'Intérieur lui a adressées par lettre, le du 4 mars 1939. Les consignes sont claires : il convient de couper complètement les réfugiés espagnols des populations locales :
"Les miliciens" [ce terme, systématiquement utilisé par les services administratifs français, désigne les combattants de l'armée républicaine espagnole] sont considérés, par assimilation aux situations prévues par le droit international, comme faisant partie d'une armée internée. Sous aucun prétexte, (…) ils ne peuvent être autorisés à gagner l'intérieur du pays.
Les Gursiens ne doivent donc pas être considérés comme des réfugiés susceptibles de bénéficier du droit d'asile, mais comme des prisonniers ("une armée internée"). Il y a là beaucoup plus qu'une nuance. La population des baraques, qui revendique le statut de réfugié, ne l'a jamais soupçonné. Arguant de cette lettre, le préfet des Basses-Pyrénées ne cherchera à aucun moment à ouvrir le camp sur l'extérieur. Il l'acceptera parfois, mais contraint et forcé et dans des proportions réduites.
Le camp sera donc clôturé par une ceinture de barbelés et gardé par la troupe. Toute tentative d'évasion sera punie d'une peine de mitard.
Rendre la lande habitable
La circulation à l'intérieur du camp se fera grâce à une route goudronnée spécialement construite pour l'occasion. Elle aura six mètres de large, sera carrossable pour les camions et directement reliée au réseau routier existant. De part et d'autre de cet axe, seront construits les îlots destinés aux internés.
Le ravitaillement en eau potable sera assuré par une dérivation du Gave d'Oloron, aménagée près du vieux moulin de Dognen. L'eau sera ensuite purifiée dans un terrain alluvionnaire présentant de bonnes qualités filtrantes, puis aspirée par une station de pompage et conduite par canaux d'amenée jusqu'aux deux réservoirs du camp (réunissant six citernes surélevées, au sud, et deux au nord).
L'évacuation des déchets du camp a suscité dès l'origine les pires craintes chez les élus locaux. Pour les calmer, les services des Ponts et Chaussées annoncent des mesures strictes. Les eaux usées seront évacuées par canalisation vers le Lausset, ruisseau qui se jette dans le Gave d'Oloron plusieurs kilomètres en aval de la dérivation ravitaillant Navarrenx.
Quant aux excréments, ils seront recueillis dans des tinettes, enfouis dans des tranchées d'épandage creusées à l'intérieur même du camp, détruits à la chaux et enterrés. Quant aux ordures, elles seront brûlées dans un incinérateur de fortune, baptisé "four crématoire".
Mais rien n'est fait pour drainer le sol de façon systématique.
L'annonce de ces mesures pousse les Béarnais à la résignation, d'autant que les travaux sont entrepris immédiatement.
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Mémorial du Camp de Gurs
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